dimanche 16 janvier 2011

HOMMAGE A NIAMEY...

 
      J'ai vécu à Niamey les deux plus belles années de ma vie. J'aime Niamey, j'aime le Niger, j'aime l'Afrique de l'Ouest, j'aime l'Afrique où je me sens chez moi, et peut-être plus qu'ici... Mais ceci est une autre histoire. J'ai écrit ce poème l'année dernière pour me remémorer le Niamey que j'ai connu, le Niamey d'il y a vingt ans, le Niamey sans terrorisme, sans peur, quand la vie était un long fleuve tranquille, le magnifique Niger aux eaux rouges dans lequel il faisait bon se baigner en lorgnant du coin de l'oeil les hippopotames qui s'ébattaient aussi dans la relative fraicheur des eaux. Dans ce Niamey là, on mangeait tous les soirs dans les maquis d'une pintade grillée, d'une sucrerie et la vie était belle comme un soleil...   En ces temps-là, le mariage mixte n'était pas puni par l'enlèvement et l'exécution...


                Niamey


Niamey
faut t'chanter
et j'l'ai jamais fait
c'est qu'alors j' croyais
qu'il fallait affiner
décrire parfaire et chantourner
l' parler
poétique et l'sublimer
rien à faire
c'était pas l' idée
du siècle
alors Niamey
j'ai jamais osé
causer de toi
et t'raconter
ma beauté
ma perle noire
toute ensablée
enchassée
entre les dunes
et la brousse
bijou d'amour
au bord du fleuve
gigantesque
où descendent les chauves-souris
et leurs cris
stridents
comme la pluie
des moussons
terribles
Niamey
faut t'chanter
ton temps figé
tes marchés
sous un soleil
d' quarante degré
essentiel
comm'une marée
ta terre rouge
craquelée
ton tempérament
entier
ta manière de t'marrer
quand tout va mal
qu'tu vas crever
de faim de soif
de pas assez
et allez
tu t'relèves
pour faire la fête
dans un kaya
avaler quelques brochettes
pimentées
puis une boite mal famée
en plein air
la vie la danse
biguin zouk
ça balance
des hanches
Niamey
faut s'caler
au creux d'tes reins
et danser
l'amour
la mort
c'est les mêmes
faut t'rencontrer
Niamey
pour comprendre ça
et qu'ça sert à rien
d'chialer
quand tout va mal
faut guincher
un pas à droite
un pas à gauche
avaler
bières sucreries
une cigarette
achetée
sans paquet
par terre
sur un bout d'tissu
au coin
d'la latérite
ou dans le sac
de chiffons humides
bien protegée
une noix de cola
jaune ou violette
à croquer
c'est âpre
mais ça fait oublier
le ventre
affamé
ça aide
à danser
jusqu'au matin
Niamey
ma belle éplorée
t'as beau mettre des pagnes
colorés
de la beauté noire
sur la crasse d'tes marchés
des parfums d'musc
sur tes corps élancés
des nattes finement tressées
sur tes visages fiers et racés
t'as beau t'efforcer d'camoufler
la merde la pauvreté
le manque d'eau d'électricité
d'hygiène d'santé
ma toute belle
c'est à pleurer
et pourtant j't'aime
et j't'aimerai
t'es la plus belle
parce que t'as l'coeur d'résister
t'as des avenues tout en terre
bâties pour la prospérité
larges comme ton fleuve
et grouillantes d'accidents
d'vélos d'motos d'solex insolents
t'es belle comme une dame
qu'aurait plus toutes ses dents
mais tu souris
t'es belle
Niamey
t'es vraiment belle
à en crever!

                                       Laure Gerbaud
                                   Tous droits réservés.

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